La Nouvelle-Calédonie figée entre deux époques
Le 30 octobre, Emmanuel Macron recevait les élus de Nouvelle-Calédonie. Deux jours plus tard, Édouard Philippe se livrait au même exercice à Matignon. L’un et l’autre se rendront à Nouméa dans le mois qui viennent. La crise catalane fait des vagues et s’il y a une chose crainte au plus haut point à Paris, c’est une explosion de violence, suivie d’une obligation de reprise en main musclée du territoire néo-calédonien. Une situation qui s’avérerait difficile à gérer quand, partant d’une grille de lecture obsolète, l’Union européenne, comme les Nations Unies, voient dans ce territoire un pays à « décoloniser ».
Posons les prémisses de cet imbroglio. Habitée par des Kanaks, la Nouvelle-Calédonie a été déclarée colonie française le 24 septembre 1853. Fait notable, avec l’Algérie, elle fut le seul territoire de peuplement de l’Empire Français. Les installations de colons se firent par vagues successives. Elles se soldèrent par le refoulement des indigènes dans le nord de l’île.
Erreur notable, l’école, comme sur nos autres terres d’Asie et d’Afrique, n’y était pas obligatoire. Il en résulta un développement séparé, la paupérisation des Kanaks et leur accès au suffrage universel seulement en 1957. Pour être honnête, il n’avait été accordé aux femmes qu’en 1944 sur le territoire métropolitain. Nous parlons aussi d’autres temps et d’autres mœurs.
Sur ce petit territoire, la France a néanmoins des intérêts. Un positionnement stratégique et des mines de nickel, dont la Nouvelle-Calédonie est le 6ème producteur mondial. Les Kanaks cependant ne sont plus que 40% de la population, la majorité étant constituée d’Européens, surnommés Caldoches, auxquels s’ajoutent des migrants de tous horizons y compris des Vietnamiens.
Aspirations indépendantistes en Nouvelle-Calédonie
Cependant, jusqu’ici quasi inexistantes, les pulsions indépendantistes naissent chez les Kanaks avec l’onde de choc de mai 1968. En 1981, l’élection de François Mitterrand et son discours tiers-mondiste font le reste. Déçus du peu d’empressement du gouvernement socialiste à satisfaire leurs attentes, les Kanaks, en novembre 1984, lancent alors un mouvement contestataire. La violence monte. À la fin du mois, on compte les trois premiers morts au cours d’une fusillade. Un jeune Caldoche de 17 ans, Yves Tual, sera tué par les indépendantistes en janvier. Les affrontements et les décès se multiplient. Les pays se retrouve en état d’insurrection.
Le référendum de 1987, le NON écrasant
Un référendum prend place le 13 septembre 1987. Il donne 98,3% des suffrages contre l’indépendance avec une participation de 59,1% des inscrits. Parmi les Kanaks, les indépendantistes n’ont pas voté.
En avril 1988, la violence est à nouveau à son apogée avec la prise de gendarmes en otages à Ouvéa. Il faut l’intervention de l’armée. Puis ce sera les accords de Matignon, au mois de juin, qui reportent l’échéance de dix ans, la mort aussi, un an plus tard, du leader indépendantiste, Jean-Marie Tjibaou, assassiné par un de ses militants en opposition avec ces accords.
Le prochain référendum prévu pour 2018
Mais en 1998, conscients qu’une nouvelle consultation mettrait le feu aux poudres, les décideurs repoussent le référendum entre 2014 et 2018. L’année prochaine ! Une manière aussi de se débarrasser du problème sur la génération à venir.
Le fond du problème, qui aura le droit de vote ?
Toute la problématique se résume finalement à un point : qui aura le droit de voter au référendum ? Que tous les résidents de nationalité française soient convoqués aux urnes et les indépendantistes perdront. La Nouvelle-Calédonie restant française, les violences reprendront. Mais que l’on restreigne le vote aux seuls Kanaks, comme ils l’exigent, et c’est un viol de notre droit. Un déni de justice pour la majorité des Français d’origines diverses dont les ancêtres sont installés en Nouvelle-Calédonie, pour certains d’entre eux depuis plus d’un siècle.
Macron et ses gentils marcheurs au pouvoir ont une équation compliquée à résoudre : comment préserver les intérêts de la France, tout en satisfaisant les Kanaks, mais en assurant l’avenir, les droits, la sécurité des biens et des personnes qui ont fait la richesse de l’île. En d’autres termes, comment éviter un nouveau bain de sang, comme en Algérie, et une nouvelle injustice, identique à celle infligée aux Pieds-noirs en 1962 ?