Fascisme aux États-Unis? Madeleine Albright hurle au loup

Danger fasciste aux Etats-Unis selon Madeleine Albright Donald Trump ferait peser le danger du fascisme sur les Etats-Unis

Madeleine Albright, ancienne secrétaire d’Etat et autrefois ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, vient de publier un livre : « Fascism : a warning » (« Fascisme : un avertissement »). Son ouvrage apparaît en fait comme un réquisitoire contre Donald Trump. Sans prendre la défense de ce dernier, les propos tenus par la Dame de fer américaine sont néanmoins un peu excessifs. Il convient de se souvenir avec quelle fureur (pardon le mot m’a échappé) elle a poussé à la guerre contre la Serbie en 1999.

Sa définition du fascisme…

Il lui fallait néanmoins définir le terme « fascisme » pour inclure Trump dans sa problématique puisque, de près ou de loin, il n’a jamais appartenu à un parti de cette obédience.

Couverture du livre "Fascism a warning", Le Fascisme, un avertissement par Madeleine Albright

Couverture du livre , Le Fascisme, un avertissement

« Un fasciste, dit-elle, est quelqu’un qui prétend parler au nom de toute une nation ou de tout un groupe, il est totalement désintéressé des droits des autres et il veut utiliser la violence ou n’importe quel autre moyen nécessaire pour atteindre les buts qu’il vise ».

réquisitoire contre Trump

Nous ne sommes pas sûrs que cette définition corresponde bien à Trump, finalement un sanguin sans idéologie, sinon celle de l’Amérique traditionnelle, qui hésite entre pragmatisme et coups de tête.

En revanche, nous voyons cette caricature de personnalité bien correspondre pour les leaders communistes et, certes, fascistes. Mais aussi, avouons-le pour un homme comme Benyamin Netanyahou. En effet, quand nous lisons le fasciste « totalement désintéressé des droits des autres » et voulant « utiliser la violence  (…) pour atteindre les buts qu’il vise », on ne peut s’empêcher de penser au Premier ministre israélien et à sa conduite à l’égard des Palestiniens.

Sans doute Madeleine Albright n’a-t-elle même pas pensé à la portée de son propos. Normal : comme le dit la Torah et le répète l’Évangile : « Tu vois la paille dans l’œil de ton voisin mais pas la poutre qui est dans le tien ».

Maintenant, quant à parler d’un danger fasciste aux États-Unis, dans le sens politique du terme, c’est ridicule. Le fascisme passe par la confiscation des trois pouvoirs identifiés (législatif, exécutif et judiciaire) par un homme ou un parti. Les institutions existant aux États-Unis ont montré leur capacité de résistance. Y compris avec Trump qui se voit obligé de composer avec elles.

En clair, Madeleine Albright, membre de l’intelligentsia américaine, surtout de la Commission trilatérale et du CFR (Council on Foreign Relations) est une mondialiste confirmée. Ce n’est pas le fascisme qui lui fait peur mais le risque que sa caste perde son influence sur le reste du monde.

Au Mali, Daech massacre de Touaregs

Des brigands massacrent des Touaregs

Selon le porte-parole du MSA (Mouvement pour le Salut de l’Azawad), Mohamed Ag Albachar, une bande de brigands a attaqué le campement d’Aklaz, le 26 avril, et celui d’Awakassa, le 27 avril, dans la région de Menaka au Mali. Au total, d’après ses propos, 43 personnes ont été tuées dont les âges s’étalent de 7 ans à 58 ans.

Qui est le MSA (Mouvement pour le Salut de l’Azawad)?

Le MSA est un groupe armé touareg, rallié au gouvernement de Bamako. Il est dirigé par Moussa Ag Acharatoumane et travaille à assurer le retour au calme au Mali tout en défendant l’identité touarègue.

Les populations attaquées à Aklaz et Awakassa appartiennent à l’ethnie des Idaksahak ou Daoussahak qui sont rattachés à la nation touarègue.

Carte de l'Azawad, territoire des Touareg

L’Azawad, le territoire d’implantation des Touareg

Les assaillants, des brigands en quête de butin, se réclament de Daech

Pour Ag Albachar, le porte-parole cité, les attaquants sont motivés par la recherche de butin de guerre. Ils sont constitués d’un mélange de Peulhs, de Touareg et d’Arabes. Le mélange d’ethnies est caractéristique des groupes qui se constituent à des fins de brigandage. Néanmoins, les hommes de ce groupe se réclament de l’idéologie de Daech (l’Etat islamique) donnant ainsi une coloration idéologique à leurs attaques.

Les Peulhs…

L’appartenance peulhe de plusieurs des attaquants nous fait cependant réagir. Les Peulhs et les Idaksahak ont en effet une longue histoire conflictuelle, les uns et les autres cohabitant avec leurs bêtes sur des pâturages proches. D’autre part, les Peulhs, du Sénégal jusqu’au nord du Nigeria, ont formé historiquement l’avant-garde de l’avancée islamique dans la région sahélienne. Usman Dan Fodio, fondateur du sultanat de Sokoto (au Nigeria), était lui-même un Peulh.

Les Peulhs gardent l’orgueil du rôle joué dans la conversion des populations de la région à l’islam. On trouve donc chez eux un terrain favorable au recrutement pour le compte d’Al-Qaïda ou de Daech.

L’instabilité de la région

A cela s’ajoute les conditions d’instabilité propres à la région sahélienne. Nous les avions évoquées dans un article publié par le « Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001 » ( Le Niger en otage). Cet article écrit en décembre 2011 après un déplacement au Niger, envisageait le problème à l’échelle de l’ensemble du Sahel.

Déjà, à nos yeux se posaient trois problèmes à régler :

  1. La montée de l’islamisme radical.
  2. L’omniprésence du banditisme alimenté entre autre par le transit de la drogue vers l’Europe.
  3. La nécessité de trouver une solution à la question touarègue dans l’équité mais aussi dans le respect du droit.                   

Aujourd’hui, grâce à l’intervention des autres pays du Sahel et en association avec les Français, ont a évité la naissance d’un émirat islamiste au Mali. Néanmoins, les moyens engagés ne suffisent pas pour assurer la sécurité de pays grands comme plusieurs fois notre pays.

La problématique des touareg reste en suspend

D’autre part, l’alliance franco-africaine n’a pas su régler la question touarègue. La solution à l’insécurité dans le Sahel ne passe-t-elle pas par une meilleure responsabilisation des chefs d’ethnies ? Sans doute aussi par la mise en place d’une véritable police du désert, comme nous l’avions fait avec les méharistes pendant la période coloniale. Les solutions trouvées à l’époque coloniale ne sont pas toutes mauvaises.

Lettre ouverte à Philippe Val à propos du Manifeste contre le nouvel antisémitisme

Le Manifeste contre le nouvel antisémitisme: Non Monsieur Val, le Coran n’appelle pas au meurtre des juifs                         et des chrétiens

Philippe Val auteur du Manifeste contre le nouvel antisémitisme

Philippe Val affirme que l’islam appelle au meurtre des chrétiens et des juifs

 

Cher Monsieur, 

Vous avez écrit et publié un « Manifeste contre le nouvel antisémitisme » dans « Le Parisien » daté du 21 avril dernier. Vous avez entraîné à signer avec vous plus de 250 personnes issues du monde politique ou du show-biz. Parmi elles, une forte proportion de membres revendiqués de la communauté juive.

Pardonnez-moi de vous le dire, pour tous les Français, mais aussi aux dépens des juifs et des musulmans, vous avez commis une mauvaise action. Une mauvaise action parce que vous affabulez. Vous dites dans le manifeste : « Nous demandons que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques ».

Si vous n’aviez dit qu’ « appelant au châtiment », votre propos sur ce point serait recevable. Il existe en effet des passages du Coran  d’une grande sévérité à l’endroit des chrétiens mais plus encore des juifs. En revanche, Je n’ai vu aucun  appel au meurtre des juifs et des chrétiens dans le Coran. Je le dis après plusieurs lectures approfondies de celui-ci, dans plusieurs traductions dont certaines avec des commentaires (voir post-scriptum).

Néanmoins, à la suite de votre intervention du 24 avril sur Europe 1, je me suis senti obligé de vérifier une nouvelle fois. En effet, vous avez alors dit la IXe sourate celle « notamment » dont se réclament « les assassins, les terroristes » pour tuer.

La sourate 9, nommée « La repentance », appelle-t-elle au meurtre ?

Les musulmans connaissent cette sourate sous le nom arabe de « Tawba », « La repentance » en français. Elle contient 129 versets et parle, de fait, entre autres, des juifs et des chrétiens.

C’est le cas du verset 29, qui semble votre cible. Il dit aux musulmans : « Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu, ni au jour dernier et ne s’interdisent pas ce que Dieu et son envoyé ont prohibé. (Combattez) également ceux parmi les gens du Livre qui ne professent pas la religion de la vérité, à moins qu’ils ne versent la capitation directement et en toute humilité ».

Seule la partie soulignée par mes soins concerne les juifs et les chrétiens intitulés « gens du Livre ». On comprend par le mot combattre qu’il s’agit d’affrontements militaires, pas de « meurtres ». La nuance est d’importance…

La « jizya » ou capitation versée autrefois par les juifs               et les chrétiens

En outre, que la possibilité soit ouverte aux juifs et aux chrétiens de verser « la capitation directement et en toute humilité » constitue la preuve qu’il n’est pas question de les tuer. Comment pourrait-on tuer quelqu’un et lui faire verser un impôt, la capitation ? Je note au passage que la loi islamique, rédigée après la mort de Muhammad (Mahomet), s’est appuyée sur cet impératif pour instituer le statut de « dhimmi ». Ceci reléguait juifs et chrétiens dans une position d’infériorité.

Le statut de « dhimmi« , des juifs et des chrétiens,                    un état d’infériorité sociale

Appliqué parfois avec modération, d’autres fois avec une rigueur effroyable, le statut de « dhimmi » n’en était pas moins toujours intolérable au regard des usages d’aujourd’hui.  Cependant, pour être honnête, autrefois la situation juridique des tenants de religions minoritaires n’était souvent pas plus enviable dans le reste du monde, y compris dans l’Europe du moyen-âge. Reste qu’il y a là, mais aussi dans d’autres domaines, matière pour manifester notre exigence.

Néanmoins, si vous l’aviez voulu, vous auriez trouvé dans le Coran, en cherchant un peu, des versets plus aimables à l’endroit des chrétiens. Par exemple le verset 82 de la Ve sourate. Il dit : «… Tu te rendras assurément compte que ceux qui sont les plus proches des musulmans par l’amitié sont ceux qui disent : « Nous sommes chrétiens ». Cela tient à ce que les chrétiens ont parmi eux des prêtres et des moines et qu’ils ne suent pas d’orgueil ».

J’aurais aimé n’avoir qu’à travailler sur les règles aujourd’hui inacceptables que les radicaux islamistes veulent imposer au reste du monde. Voire même ces principes dont certains musulmans souhaitent le maintien sans en saisir le côté intolérable pour les autres. Mais, des affirmations erronées comme les vôtres, Monsieur Val, m’obligent à me précipiter sur un autre front. Ceci au nom de l’équité et de la vérité, car sans elles comment « vivre ensemble » comme vous dites ? Je ne pense pas seulement aux migrations sur notre sol mais à la coexistence des hommes sur terre…

Val « ..les terroristes ont tous été musulmans « 

Car l’iniquité et la déformation de la vérité, j’en suis sûr inconsciemment, vous les répandez sous une autre forme quand vous affirmez :

« Évidemment je ne pense pas que tous les musulmans sont des assassins et des terroristes. En revanche, les terroristes ont tous été musulmans ».

Non, tous les terroristes ne sont pas, ou « n’ont pas été » musulmans. Sans remonter très loin dans l’histoire, nous avons eu en Europe des précédents avec les anarchistes, les Basques, les Irlandais protestants et catholiques, les membres de l’OAS et du FLN. Dois-je aussi vous rappeler, au Moyen-Orient, les attentats commis en Palestine par des juifs de la Première Guerre mondiale au début de L’État d’Israël ? Certes, des Arabes savaient leur rendre la pareille.

Mais c’est vrai, j’en suis témoin, aujourd’hui les attentats perpétrés au nom d’un islam déformé sont les plus nombreux. Ils laissent loin derrière eux les actions terroristes commises, le plus souvent, par des groupes gauchistes, vos anciens amis, ou des illuminés d’extrême droite.

Une stigmatisation indigne des musulmans

Est-ce une raison pour stigmatiser tous les musulmans, comme vous le faites ? Beaucoup sont même plus victimes que nous autres en raison de la fréquence des attentats sur leur sol : en Irak, grâce à nos amis Américains, en Afghanistan, en raison d’une guerre inévitable que nous n’avons pas su conclure par une bonne paix.

Pour parler, il faut de la confiance et du respect. Vous engendrez leur contraire par votre discours. Pourtant, sur Europe 1, vous avez dit vouloir le dialogue avec les musulmans. Voilà pourquoi je vous invite à admettre votre erreur. A reconnaître que dans le Coran il n’existe pas d’appels au meurtre des juifs et des chrétiens. La réalité est suffisamment horrible pour ne pas en rajouter.

Des propos qui peuvent susciter des troubles                   dans notre pays

En outre, si la communauté juive est plus que d’autres menacée en France, des propos comme les vôtres risquent de provoquer  une guerre civile sur notre sol. Les juifs en seraient les premières victimes. Je crains quelques individus, dans notre pays, de souffler sur les braises pour nous faire oublier d’autres conflits.

Je suis bien sûr prêt à parler de  tout cela avec quiconque le souhaite. Y compris avec vous. Néanmoins je doute que vous me fassiez cet honneur. Et je le regrette car cela serait la preuve que, comme le vin, que vous vous bonifier en vieillissant. Pardonnez-moi cette gauloiserie…

Je vous prie d’agréer, cher Monsieur, l’expression de mes salutations les meilleures.

                                                                                                             Alain Chevalérias

P.S. : Ces traductions sont celles de Muhammad Hamidullah, celle de D. Masson, celle de la secte du Jamaat Ahmadiyyia et deux autres autorisées par la monarchie saoudienne, l’une en français, l’autre d’une facture différente mais rédigée en anglais. Ma préférence va à la traduction du défunt cheikh Si Boubakeur Hamza, ancien recteur de la Mosquée de Paris et père de Dalil Boubakeur. Celle-ci est accompagnée de commentaires approfondis et d’une grande érudition. C’est son travail que j’utilise dans cette lettre. Dans certains cas, j’ai demandé à des arabophones compétents de m’éclairer sur le sens de telle ou telle phrase.

Lire aussi: dans les articles publiés par « Le Centre de Recherches sur le Terrorisme Depuis le 11 Septembre 2001″:

 

Un ancien général syrien parle sur l’emploi des gaz de combat

En réponse à l’usage de l’arme chimique

Dans la nuit du 13 au 14 avril 2018, les forces américaines, avec l’appui des Britanniques et des Français, ont effectué une série de raids contre trois cibles du régime syrien, à Damas et à Homs. Ces attaques ont touché des objectifs qui, selon les pays occidentaux, concernent « les capacités d’armes chimiques » de Bachar Al-Assad. C’est une réponse à l’utilisation des gaz de combat contre des populations civiles, dont l’Occident accuse le régime, encore récemment dans la Ghouta. Il convient sur ce sujet de parler d’une hypothèse, fût-elle forte et pour beaucoup une conviction, tant que des preuves indiscutables n’ont pas été données à l’opinion publique. Néanmoins les indices s’accumulent. Or, étrangement, le régime syrien a refusé jusqu’au dernier moment que des enquêteurs des Nations Unies se rendent sur place. On sait néanmoins ces retournements de l’ultime minute souvent servir de prélude à de nouvelles discussions sans issue. La promesse des Russes, en septembre 2013, de neutraliser les capacités chimiques de l’armée syrienne, en est un exemple. De plus, même si nous n’avons pas une confiance aveugle dans la sincérité des gouvernements de nos pays, nous ne croyons pas qu’ils frôleraient une guerre mondiale sans disposer d’informations convaincantes.

Nous produisons ce document comme pièce à joindre au dossier, pour aider les uns et les autres à se faire une opinion.

Interview du général Zaher As-Saket,
ancien chef d’UNITÉ Chimique dANS L’armée syrienne

Zaher al-Saket, ancien général de l'armée syrienne.

Zaher as-Saket, ancien général de l’armée syrienne.

Cette interview a été accordée par le général Zaher As-Saket, d’Alep (de Bab Al-Hadid), né le 5 janvier 1963 et fils d’Abdel Rahman As-Saket. Il était le chef du département chimique dans la 5ème division. Il avait environ 500 hommes sous ses ordres. Il était chargé de former les soldats pour réagir dans un environnement militaire d’utilisation de l’arme chimique (les gaz de combat). Il avait aussi une mission d’évaluation en matière d’armes chimiques en cas d’attaque ennemie. Il servait sous les ordres du « liwa » (major général) Ali Hassan Ammar.

Il est entré dans l’arme chimique en 1981. Quand les premières manifestations pacifiques ont éclaté, en mars 2011, il servait dans l’unité arme chimique de la Ferqa 5 (5ème division).

Zaher As-Saket se rend compte des mensonges du régime

« Au début, dit-il, j’ai cru la propagande du régime et pensais que c’était vraiment des terroristes qui attaquaient à Deraa et dans les autres villes. Puis j’ai reçu l’ordre de faire fabriquer 800 cocktails Molotov par mes hommes. Je me suis demandé pourquoi. C’est une arme utilisée normalement par des manifestants ou une opposition violente. Pas par une armée régulière. Puis l’armée syrienne a placé ces cocktails Molotov à la mosquée Al-Omari, à Deraa, où avaient séjourné les opposants. Par voie de presse, les autorités ont accusé l’opposition d’avoir fabriqué ces Molotov pour attaquer les forces du régime. J’ai alors compris que le régime mentait sur la réalité des événements. Puis j’ai assisté de mes propres yeux à des tirs de canons dirigés non contre de supposées positions d’une opposition armée qui n’existait alors pas, mais contre la population. Des officiers supérieurs en faisaient un jeu ».

Les soupçons se faisant de plus en plus pesant sur lui et son désaccord avec la politique menée allant croissant, il a fini par prendre des contacts indirects avec l’opposition. Pour exercer une influence sur lui, le régime a alors emprisonné l’un de ses fils, se servant de lui comme d’un otage. Le jeune homme a été durement torturé.

Le régime torture son fils

Saket explique : « Le régime a l’habitude de faire cela depuis 1981-1982, lorsque les Frères musulmans se sont rebellés contre lui. C’est devenu alors une habitude d’arrêter les proches, de les garder en otages et de les torturer ».

Dans son bataillon, ils avaient uniquement deux gaz à disposition : du « chlore bekrine », dit-il, en fait de la chloropicrine, et du chlore astofinoun, plus exactement de la chloro-acetophenone, pour entraîner les soldats à subir une attaque chimique.    

Au mois d’août 2012, il a été appelé avec ses adjoints par le liwa Ali Hassan Ammar. Il raconte :

Le régime lui remet des gaz de combat

« On m’a donné les produits de la part du liwa Ali Hassan Ammar. C’étaient trois petits containers contenant chacun cinq litres de phosgène. Enfin, de phosgène de laboratoire et non pas ce que l’on appelle généralement du phosgène. On expose le produit au soleil dans des bouteilles de verre pendant 24 heures. Pratiquement, pendant deux jours d’affilée. Il se transforme ainsi en phosgène sous l’effet de la lumière du soleil et devient un agent suffocant. C’est un procédé artisanal qui était utilisé.

J’ai reçu ces trois containers pour les entreposer. Ils ont été utilisés à Cheikh-Meskine  au mois d’octobre 2012, dans la région du Hirak au mois de janvier 2013 et dans la région de Bosra el Harir là aussi au mois de janvier. (N. du T. : Ces agglomérations se trouvent à une vingtaine de km au nord et au nord-ouest de Deraa).

 Après le tir du projectile, un nuage se serait alors constitué qui se serait dirigé sur la ville. Cela aurait pu toucher 10% de la population. Je n’ai pas supporté cette idée. J’ai remplacé le phosgène par de l’eau de javel qui est sans danger. Puis certains de mes hommes, qui ont déserté plus tard avec moi, pour s’en débarrasser, ont enterré la matière toxique profondément dans des endroits isolés.

 Il y a eu ensuite deux batailles, une à Hirak, en janvier 2013, et l’autre à Amoud Horan, dans le secteur de Bosra el Harir. On était entré dans la phase de la rébellion armée. A Bosra el Harir, les combats étaient très durs. L’armée avait beaucoup de pertes. Ordre a été donné de mettre en œuvre les charges de phosgène. Puis la troupe a avancé, sûre que l’ennemi était neutralisé par le gaz. Mais elle a été accueillie par un feu nourri occasionnant de nouvelles pertes dans ses rangs. Des collègues officiers et mes supérieurs ont alors commencé à douter sérieusement de moi ».

La pression montant, il explique : « J’ai fini par quitter la Syrie avec l’aide de l’opposition. Je suis parti avec quelques-uns de mes hommes et nous avons rejoint la Jordanie. Aujourd’hui, je suis en Belgique avec ma famille ». Saket dit avoir récupéré son fils détenu avec de l’argent. Nous avions déjà remarqué la facilité avec laquelle les officiers syriens se laissaient corrompre, quand ils occupaient le Liban.

Pour Saket, aucun doute que le régime continue d’utiliser les gaz de combat

Enfants syriens morts suite aux frappes du régime avec le gaz sarin

Le 4 avril 2017. Khan Chikhoun, des enfants syriens morts suite à des attaques au gaz sarin, d’après les accusations de l’opposition.

Saket ne doute pas une seconde que le régime ait à nouveau utilisé les gaz de combat dans la région de la Ghouta. Mais il précise : « Néanmoins, je ne pense pas que le plus important dans la décision de lancer des attaques chimiques soit de tuer. A mon avis, le régime cherche surtout à faire peur aux civils. Je crois qu’il essaie par ce moyen de chasser les habitants afin, comme il a commencé à le faire, de faciliter le transfert de populations iraniennes sur les territoires qui lui sont hostiles. Parce que l’arme chimique inspire une véritable terreur, une peur bien plus grande que les balles ou les obus ». 

Quant aux preuves, il sourit. « Demandez donc aux officiers de l’armée, rétorque-t-il. En interne, le cercle proche de Assad montre de la fierté pour cela. Lors de meetings officiels avec les officiers de l’armée, ces proches d’Assad expriment ouvertement ce sentiment en le proclamant. Cela sert aussi de test. Si un officier a l’air de désapprouver, il est arrêté et il disparaît dans les prisons du régime. Je peux vous affirmer, tous les officiers supérieurs sont informés et complices des crimes perpétrés contre notre population ».

Lire aussi:

Moussa Koussa, homme clef d’un supposé financement libyen de Sarkozy

Sarkozy et le supposé financement libyen de la campagne présidentielle de 2007

Moussa Koussa connaît la vérité

Sarkozy et Kadhafi, une amitié qui a mal fini!

Sarkozy recevant Mouammar Kadhafi en France en décembre 2007

Une note tirée des archives des services secrets libyens, datée du 10 décembre 2006, parle d’un accord de financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 par l’État libyen, à hauteur de 50 millions d’euros. Seule preuve concrète, pour Sarkozy, c’est un faux.

Ce document est signé par un certain Moussa Koussa, alors chef des services de renseignements extérieurs de Mouammar Kadhafi. Je l’ai croisé en mars 2011 à Tripoli, pendant l’offensive dont Sarkozy était le principal initiateur.

Moussa Koussa était devenu ministre des Affaires étrangères. Il avait son bureau à l’hôtel Rixos où il servait de porte-parole du gouvernement libyen lors des conférences de presse. Avec mes collègues journalistes, nous étions pour la plupart logés dans le même hôtel.

Ma demande des preuves déclenche la fureur de Moussa Koussa

Déjà, à l’époque, les responsables du régime parlaient du financement de Sarkozy par Kadhafi. J’ai alors demandé des preuves écrites. Aujourd’hui exilé en Europe, un contact libyen m’a affirmé Moussa Koussa en possession d’un document. Il m’a amené à la porte du bureau de ce dernier me priant d’attendre. Au bout de quelques minutes, le dit contact est ressorti du bureau escorté par les hurlements du ministre.

Moussa Koussa fait défection…

Quelques jours plus tard, Moussa Koussa prétextait un déplacement à l’étranger pour déserter en direction de Londres. Son refus de parler à propos de l’affaire Sarkozy devenait logique. Aujourd’hui dépendant pour sa sécurité des pays occidentaux, il ne veut pas se faire de nouveaux ennemis.

Néanmoins, si la note datée du 10 décembre 2006 était un faux, il serait stupide, de la part des anciens amis de Kadhafi, de la présenter portant la signature de Moussa Koussa. En effet, en tant que transfuge dépendant de ses protecteurs, si le document est authentique, il est dans son intérêt de déclarer qu’il s’agit d’un faux. Ce qu’il a du reste fait. Alors? Faites vos jeux…

Alain CHEVALERIAS

Pour approfondir le sujet, lire :

Des Druzes de Syrie demandent la protection d’Israël

Rencontre secrète entre des Druzes de Syrie et le premier ministre israélien

Le 27 février dernier, une délégation de Druzes de Syrie a rencontré Benyamin Netanyahu dans ses bureaux à Jérusalem. Elle a demandé la protection politique et militaire d’Israël pour sa communauté.

Deux des trois membres de la délégation venaient de la région d’As-Suwayda (ou Suyada), dans le Jebel druze, à une cinquantaine de km de Deraa dans le sud de la Syrie. La troisième personne, appartenant elle aussi à la communauté, vit au Venezuela et servait d’intermédiaire.

Après avoir rencontré un membre druze de la Knesset appartenant au Likoud, Ayub Qorra (les Israéliens écrivent Ayoob Kara), la délégation s’est rendue au bureau du Premier ministre israélien.

Les deux personnes venues de Syrie, pour se rendre en Israël, ont d’abord pris un avion jusqu’en Europe. De là, elles se sont envolées pour l’aéroport David-Ben-Gourion.

Cette allégeance de Druzes syriens à l’Etat hébreu suit une longue période de collaboration de la majorité de cette communauté avec les autorités de Damas. La recherche d’un nouveau protecteur révèle l’inquiétude croissante des Druzes de Syrie dans une région, le sud, où le régime de Damas est en difficulté face aux groupes islamistes et aux rebelles démocrates soutenus par les Etats-Unis.

Un rapprochement avec les Druzes de Syrie revêt une grande importance pour Israël

De leur côté, les Israéliens ont leurs raisons de recevoir avec empressement la démarche druze. Profitant des événements et du désordre prévalant en Syrie, ils ont du reste approché les populations du Jebel druze syrien et leur ont donné de l’argent à titre humanitaire. Ainsi, en l’espace de trois ans, ils ont fait parvenir 20 millions de dollars aux Druzes de la région d’As-Suwayda. La rencontre de Jérusalem, prenant néanmoins une importance stratégique remarquable, faisait suite à cette manœuvre israélienne.

Il y a trois lectures complémentaires de l’intérêt israélien pour les Druzes de Syrie.

1/ La motivation interne

Les Druzes forment en Israël une communauté de 100 000 âmes. On les trouve dans le nord du pays et sur le plateau du Golan, confisqué par les Israéliens à la Syrie lors de la guerre de 1967 (guerre des Six Jours) et annexé depuis 1981.

En outre, il faut savoir les Druzes israéliens pour la plupart très intégrés à la société israélienne. Ils sont les seuls non-juifs du pays à effectuer un service militaire, à la demande de la communauté elle-même. Ils sont nombreux dans les unités combattantes, en particulier dans les troupes de protection des frontières appelées MAGAV, et plusieurs servent comme officiers.

Les opérations de séduction israéliennes à l’égard des Druzes du Liban et de Syrie sont habituelles. Elles sont d’abord destinées à renforcer l’alliance interne des Druzes d’Israël et des autorités israéliennes. Elles donnent le sentiment à cette communauté qu’une relation stratégique forte existe entre elle et les juifs.

2/ L’explication stratégique

Les Israéliens nourrissent un état d’esprit de population assiégée. Tout ce qui se trouve de l’autre côté de leur frontière leur fait peur. Leurs comportements agressifs, les survols de leurs avions de combat au-dessus des pays voisins, sans compter les bombardements, autrefois au Liban aujourd’hui en Syrie, suscitent il est vrai des ressentiments à leur égard. De plus, tout en tenant un discours anti-israélien, les Iraniens et leur allié, le Hezbollah libanais, ajoutent à la paranoïa israélienne en se rapprochant de la frontière israélo-syrienne, à proximité du Golan.

Pour faire face à cet environnement, perçu comme hostile, Israël cherche des alliés dans la zone du territoire syrien proche de ses frontières. Dans ce but, il a déjà ouvert ses « check points » à des combattants rebelles blessés et les a soignés dans ses hôpitaux. Il a même été jusqu’à créer des canaux de communication avec des groupes islamistes. Certains responsables de ces derniers se sont rendus en Turquie, venant du sud de la Syrie, en passant par le territoire israélien. Néanmoins, cela n’a pas de signification stratégique croyons-nous.

Dans ce cadre, les Druzes de la région de As-Suwayda apparaissent eux aussi d’un intérêt certain en raison leur proximité des frontières israéliennes.

3/ Le lien avec les Kurdes d’Irak

Il existe aussi un projet israélien moins connu et passé sous silence par la plupart des experts. Celui-ci suppose le contrôle, direct ou indirect par Israël, du sud de la Syrie et d’une bande de territoire de ce pays jouxtant la Jordanie.

Avant la Révolution syrienne, une pareille idée pouvait paraître farfelue. Aujourd’hui, en raison du désordre syrien et de la division de fait de l’Irak, elle apparaît envisageable.

Nous sommes au courant de ce projet depuis 2004. Il consiste, pour les Israéliens, à développer une alliance stratégique avec les Kurdes d’Irak pour s’en approprier les ressources en hydrocarbures et en eau. Pour ce dossier, nous renvoyons nos lecteurs à l’étude que nous avons réalisée sur le sujet pour le « Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001 ».

Carte: Itinéraire Kurdistan irkaien- Golan Syrie Druzes -Israël

Itinéraire du Kurdistan irakien au Golan, du côté occupé par Israël, d’un indispensable pipe-line

Si l’alliance avec les Kurdes d’Irak, en particulier avec la famille Barzani, a pris facilement forme pour Israël depuis l’attaque américaine contre Saddam Hussein du printemps 2003, reste le dilemme de l’acheminement de l’eau et du pétrole. Un rapide coup d’œil sur les cartes permet de comprendre qu’il n’existe qu’une seule voie possible, échappant à un interdit des autorités irakiennes, pour installer des pipe-lines : une bande de territoire syrien partant du Golan, longeant la frontière jordanienne puis la frontière irakienne jusqu’à l’accès aux territoires kurdes du nord de l’Irak.

Or, le Jebel druze de la région de As-Suwayda se trouve sur cet itinéraire.

Du Golan à As-Suwayda, les Druzes s’offrent sur un plateau

Au Proche-Orient, plusieurs minorités s’estiment non-arabes et, pour certaines d’entre elles, craignent les radicaux islamistes pour des raisons religieuses. Il y a les Kurdes et les Druzes, mais aussi certains chrétiens ou les yézidis. Pour ses intérêts, Israël est prêt à les utiliser, puis à les trahir, comme il l’a fait autrefois avec les chrétiens du Liban. Les Druzes devraient y penser !

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SYRIE : Nettoyage ethnique dans la Ghouta

Depuis le début du mois de février, plus particulièrement depuis le 19, le régime syrien bombarde intensivement la Ghouta orientale.

Des ONG accusent le régime syrien et la Russie de crimes de guerres

Amnesty International dit dans un bulletin daté du 20 février : « L’État syrien, avec l’appui de la Russie, prend pour cible intentionnellement sa propre population en Ghouta orientale. Ces personnes, déjà cruellement assiégées depuis six ans, sont désormais prises quotidiennement sous le feu d’attaques délibérées qui les tuent et les mutilent et qui constituent manifestement des crimes de guerre ».

Où est passé l’accord de désescalade dont faisait partie la Ghouta?

Pourtant, le 22 juillet 2017, à la suite d’un accord passé entre la Russie, la Turquie et l’Iran, des « zones de désescalade » étaient proclamées en Syrie. Parmi elles, en tête de liste, figurait la Ghouta orientale. Dans ces « zones de désescalade » les trois pays se promettaient d’instituer des cessez-le-feu, une sorte de cohabitation en attendant des négociations. 

Certes, dans la Ghouta orientale, une grosse partie des combattants sont des salafistes. Le nier revient à tomber dans le piège du régime en prêtant aux pays occidentaux le rôle de protecteurs occultes des structures islamistes.

Cependant, n’en déplaise à quelques excités aux vues simplistes, qui dit islamiste ne dit pas terroriste. Un islamiste veut l’application de la loi islamique. Il devient terroriste quand il prend des civils pour cible. Comme Al-Qaïda et Daech (L’État islamique). Si je réfute l’islamisme, je suis pourtant obligé de reconnaître le droit à l’expression de ses militants. Comme je l’ai toujours fait pour les communistes.

Néanmoins, c’est d’abord à la distinction entre les combattants et les civils qu’il faut s’efforcer. Par principe. Mais aussi, dirai-je, par calcul, parce que, comme nous allons le voir, les civils sont le véritable enjeu de cette guerre.

Quels sont les enjeux de cette offensive ?

Le régime, à travers une démarche de la Russie, s’est dévoilé le 22 février. Il a offert aux combattants de la Ghouta orientale de les évacuer vers la région d’Idlib. Comme l’a dit Sergueï Lavrov, l’habile ministre des Affaires étrangères russes, « à la manière dont l’évacuation des combattants et de leurs familles avait été organisée à Alep-est », en décembre 2016. Il s’exprimait au cours d’une conférence de presse à Belgrade, 

Le scénario d’Alep se répète

On a vu. Lâchés dans les campagnes de la province d’Idlib, les civils se sont retrouvés sous la pluie et dans le froid. Quand ils n’avaient personne pour les abriter, les maisons étant déjà bondées, ils ont couché dehors avec parfois des bébés en bas âge. Pire, pour manger, ils ont dû accepter la charité des Turcs.

A Alep, en revanche, dans les quartiers qu’ils avaient abandonnés, d’autres s’installaient. Des fidèles du régime et même des Iraniens. Être parti de cette ville a signifié perdre à jamais les quelques biens que l’on y possède, parfois la maison de famille où l’on est né.

Il s’agit bien d’un nettoyage ethnique

Finalement, comprend-on, en offrant aux combattants de l’opposition et à la population de quitter une ville, les Russes et les responsables du régime effectuent un transfert de population. En Bosnie, on appelait cela un « nettoyage ethnique ».

Pourquoi, direz-vous, les civils ne sont-ils pas restés à Alep-est ? Simplement parce que toute personne ayant vécu dans les zones tenues par les opposants armés est considérée comme complice de ces derniers par le régime. Elle le sait, elle risque de finir en prison sous la torture. A cela s’ajoute la haine contre les ordonnateurs des bombardements : le clan de Bachar Al-Assad, les chefs de l’armée et des services de renseignement.

400 000 civils menacés

Ghouta orientale, plus de 400 civils victimes des bombardements syro-russes

Déjà plus de 400 civils tués dont une centaine d’enfants dans la Ghouta orientale

Encore, à Alep-est, ne s’agissait-il que de trente à quarante mille personnes évacuées sur une province voisine. Cette fois, 400 000 civils sont concernés, pour un déplacement de 350 km à travers des zones tenues par des milices indisciplinées.  

Mais pour quelle finalité ? Ces réfugiés iraient s’entasser dans la province d’Idlib déjà prise d’assaut par des centaines de milliers de déplacés. De plus, cette zone est elle même soumise aux attaques du régime. On la sait même menaçant de devenir la prochaine cible des gouvernementaux après la chute de la Ghouta orientale. En clair, pour cette population martyre, Idlib ne serait qu’une étape vers la Turquie et, soyez en sûrs, vers l’Europe. Nos pays sont-ils prêts à recevoir une nouvelle vague de migrants syriens ?

Un cessez-le-feu et puis des élections…

Évitant de réduire ce drame à nos intérêts d’Occidentaux nantis, ramenons-le aux simples droits d’un peuple sur sa terre. Les États-Unis, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et la France ont concocté un plan de fin des hostilités qui devrait aboutir à des élections. Très bien, parce qu’il n’y a pas d’autre légitimité possible pour un gouvernement.

Mais qui va voter ? Les millions de réfugiés syriens poussés hors des frontières de leur pays ne disposent pas des papiers nécessaires. En dépit des illusions des pays occidentaux, nombre de ces réfugiés seront privés d’un droit élémentaire, celui de voter. En revanche, les partisans du régime présents en Syrie, voire même des Iraniens aujourd’hui pourvus de papiers syriens, voteront dans le sens voulu par le pouvoir.

Ce serait une mascarade d’élection. Une ré-intronisation de Bachar Al-Assad dans la duplicité dont nous serions responsable par délit de naïveté.

Voilà pourquoi, si j’étais un Syrien habitant la Ghouta orientale, comme la population en a fait le choix, je resterais chez moi. Même si j’étais opposé aux militants islamistes. Parce que ce serait la seule façon de préserver mes droits.

L’Occident parrain d’un nettoyage ethnique?

Pour nous, Occidentaux, la question est simple, devons-nous nous parrainer un nettoyage ethnique croyant préserver notre tranquillité ? Nous serions lâches et cette lâcheté ne nous servirait à rien puisque, dans quelques mois, nous retrouverions les réfugiés de la Ghouta orientale chez nous.

Voilà pourquoi il convient d’obliger les autorités syriennes à cesser ses bombardements et à laisser passer les aides humanitaires nécessaires à la survie de la population. Dans la Ghouta orientale, mais aussi dans les autres zones assiégées de Syrie.

La cause réelle du mécontentement en Iran

Iran, c’est à Machhad que les manifestations commencent

Le 28 décembre, des manifestations éclataient à Machhad, deuxième ville d’ Iran, puis s’étendaient à une quarantaine de villes du pays. D’abord de quelques centaines de personnes, elles atteignaient bientôt des milliers d’individus.

Les manifestants s’en prennent au mobilier urbain et l’on signale plusieurs attaques de commissariats. Les slogans entendus attaquent le Président de la République, Hassan Rohani, considéré comme un modéré, et le Guide, Ali Khamenei, héritier en titre de l’Imam Khomeiny. Ils dénoncent aussi la situation économique.

Les raisons de la colère des Iraniens

Les raisons de la colère contre le régime ne manquent pas en Iran. Cependant, cette fois, les problèmes économiques semblent s’imposer, au point de dépasser, au moins en partie, l’habituelle scission entre classes bourgeoises, rétives au régime, et catégories populaires fidélisées par celui-ci avec l’argent du pétrole.

Mais alors, pourquoi maintenant, quand l’Iran, depuis la Révolution islamique, n’a jamais brillé par la prospérité de son économie ?

Le budget 2018 de Rohani, allume l’étincelle

Des faits, sinon ignorés du moins oubliés par la presse occidentale, ont pris place. Le 10 décembre, le Président Rohani soumettait le budget de l’année 2018 au Parlement. Point remarquable, il a réduit les subventions de l’État sur les produits de première nécessité de manière drastique, augmentant d’autant les prix pour les consommateurs. Les plus touchés sont le carburant et la nourriture. Les œufs en particulier, d’où le nom de « Révolution des œufs », donné par les Iraniens à leur coup de sang.

On s’étonne, Rohani a été élu sur la base de ses engagements à relever le niveau de vie des Iraniens. Alors, pourquoi ces mesures ?

Les diktats du FMI

Le FMI (Fonds monétaire international) nous en donne la réponse. Le 18 décembre, l’organisation internationale présentait le rapport de fin de mission de son envoyée en Iran, Catriona Purfield.

Celle-ci se disait très satisfaite des résultats obtenus. « La poursuite des progrès, affirmait-elle, vont faciliter la réintégration (de l’Iran) dans le système financier global, en améliorant la transparence et la gouvernance ».

Figuraient dans un court paragraphe les exigences habituelles du FMI, en matière de restrictions budgétaires, pour accorder des lignes de crédits en même temps que sa caution auprès des grandes banques. Parmi ces restrictions énoncées dans le rapport, « la suppression des coûteuses subventions » à la consommation. 

Les effets pervers des conditions du FMI sur l’Iran

En clair, comme il l’a fait dans nombre de pays en difficulté, on se souvient de la Grèce, le FMI a imposé ses conditions pour aider l’Iran et l’intégrer dans le système financier international.

Toujours avec les mêmes conséquences : le peuple, en particulier les plus démunis payent la note en se serrant un peu plus la ceinture. Voilà pourquoi les Iraniens sont descendus dans la rue. Les motivations traditionnelles, comme le rejet de la bigoterie islamiste par une partie de la population, n’ont fait que s’y ajouter.

Mais, on ne voit toujours pas ce qui a pu amener Rohani à provoquer une crise dont il se serait bien passé. Après tout, l’Iran a bien vécu relativement coupé du monde depuis la Révolution de 1979.

Pour que les affaires des milieux financiers continuent de prospérer

Pour comprendre, il faut connaître les aspirations profondes du gouvernement de Rohani. L’appartenance idéologique de ses membres nous l’indique. D’abord, l’un de ses vice-présidents s’appelle Mohammad Bagher Nobakht. Il dirige l’Organisation de la planification et du budget, supprimée un temps par le Président Ahmadinejad en raison de sa proximité des structures économiques mondialistes comme le FMI. Il est à la tête du Parti du Développement et de la Modération proche du milieu des affaires.

Le clan des « amis » de Rafsandjani

Khameneï, Guide suprême de la république islamique d' Iran

Khameneï, « Guide de la République islamique d’ Iran », et feu Rafsandjani: une complicité jamais démentie

 Cette inclination du gouvernement transparaît encore mieux quand on découvre plusieurs personnalités autrefois associées au Président Ali Akbar Rafsandjani (aux affaires de 1988 à 1997) dans le gouvernement. Or, l’on connaît ce dernier pour s’être constitué une fortune colossale en profitant de ses positions dans les institutions dirigeantes du pays. Il n’avait jamais caché sa proximité de la finance iranienne, mais aussi étrangère.

Parmi ces personnalités, figure Eshagh Jahangiri, le premier des vice-présidents. Il avait été nommé gouverneur d’Ispahan par Rafsandjani en 1992.

On voit aussi Bijan Namadar Zangeneh, actuel ministre du pétrole, qui a fait une longue carrière à la tête du ministère de l’Énergie sous Rafsandjani.

Autre nom, Mohammad-Ali Najafi, l’actuel maire de Téhéran, lui aussi un proche du Président, qui a servi comme ministre de l’Éducation avec Rafsandjani.

Dans tous les cabinets ministériels on retrouve de ces technocrates, autrefois au service de Rafsandjani, qui, tout en étant des soutiens indéfectibles du régime islamiste, souhaitent une ouverture économique sur le reste de la planète afin de permettre aux milieux d’affaires d’arrondir leurs fortunes.

Or, ils savent que cela passe par la soumission aux diktats du FMI. D’où les accords passés mis en exergue par le rapport de fin de mission évoqué plus haut.

Problème, tout le monde sait la suppression brutale des subventions aux produits de première nécessité suscitant toujours l’augmentation des prix et partout la colère des plus touchés, les classes populaires. Le Président Rohani s’est sans doute cru protégé par son image d’homme d’ouverture. En ce cas, il s’est trompé.

Quant aux gens du FMI et à ceux qui les pilotent, ils ne pouvaient pas ignorer que la suppression des subventions allait susciter une vague de mécontentement générale.

Aujourd’hui, les autorités iraniennes accusent les puissances étrangères d’organiser les troubles et de diriger les émeutes. On sourit quand on connaît la dextérité des services iraniens pour quadriller le pays. En fait, les décideurs du pays se sont probablement piégés eux-mêmes en cédant aux demandes du FMI. Non que la suppression des subventions ne soit pas nécessaire, mais parce qu’elle aurait dû être étalée dans le temps.

Rohani accuse les Moujahidine-e-Khalq

Quant à imaginer, comme l’affirme Rohani, les Moujahidine-e-Khalq (1) menant les manifestations, on tombe dans le délire. Il faut savoir cette organisation honnie par l’immense majorité des Iraniens. Non parce qu’elle a été qualifiée de terroriste pendant longtemps par l’Union européenne et les Nations Unies, mais en raison de son alliance avec l’Irak, pendant la guerre qui opposa ce pays à l’Iran dans le courant des années 80.

Aujourd’hui basée à Auvers sur Oise, dans la région parisienne, elle sert de monnaie d’échange dans les négociations entre Paris et Téhéran. En Iran, ses agents seraient rapidement démasqués et livrés à la police, ce quelle que soit la tendance politique des Iraniens.

D’un côté, nous restons convaincus de la nécessité d’exercer de fortes pressions sur le pouvoir iranien pour l’amener à un comportement moins provocateur à force de manipulations à travers le monde (2). De l’autre, nous croyons dangereux de pousser ce pays à la faute pour susciter des troubles, comme nous soupçonnons certains de l’avoir fait en se servant du FMI. Parce que cela ne peut que déboucher sur une guerre civile si le calme ne revient pas rapidement. Certes, cela affaiblirait l’Iran sur le front syrien, ce dont on ne peut que se réjouir. Mais en ajoutant à l’instabilité générale dans un Moyen-Orient déjà au bord de l’implosion.

 Alain Chevalérias

Notes

 

Le référendum en Nouvelle-Calédonie s’ouvre sur un dilemme

La Nouvelle-Calédonie figée entre deux époques

Le 30 octobre, Emmanuel Macron recevait les élus de Nouvelle-Calédonie. Deux jours plus tard, Édouard Philippe se livrait au même exercice à Matignon. L’un et l’autre se rendront à Nouméa dans le mois qui viennent. La crise catalane fait des vagues et s’il y a une chose crainte au plus haut point à Paris, c’est une explosion de violence, suivie d’une obligation de reprise en main musclée du territoire néo-calédonien. Une situation qui s’avérerait difficile à gérer quand, partant d’une grille de lecture obsolète, l’Union européenne, comme les Nations Unies, voient dans ce territoire un pays à « décoloniser ».

Posons les prémisses de cet imbroglio. Habitée par des Kanaks, la Nouvelle-Calédonie a été déclarée colonie française le 24 septembre 1853. Fait notable, avec l’Algérie, elle fut le seul territoire de peuplement de l’Empire Français. Les installations de colons se firent par vagues successives. Elles se soldèrent par le refoulement des indigènes dans le nord de l’île.

Erreur notable, l’école, comme sur nos autres terres d’Asie et d’Afrique, n’y était pas obligatoire. Il en résulta un développement séparé, la paupérisation des Kanaks et leur accès au suffrage universel seulement en 1957. Pour être honnête, il n’avait été accordé aux femmes qu’en 1944 sur le territoire métropolitain. Nous parlons aussi d’autres temps et d’autres mœurs.

Sur ce petit territoire, la France a néanmoins des intérêts. Un positionnement stratégique et des mines de nickel, dont la Nouvelle-Calédonie est le 6ème producteur mondial. Les Kanaks cependant ne sont plus que 40% de la population, la majorité étant constituée d’Européens, surnommés Caldoches, auxquels s’ajoutent des migrants de tous horizons y compris des Vietnamiens.

Aspirations indépendantistes en Nouvelle-Calédonie

Cependant, jusqu’ici quasi inexistantes, les pulsions indépendantistes naissent chez les Kanaks avec l’onde de choc de mai 1968. En 1981, l’élection de François Mitterrand et son discours tiers-mondiste font le reste. Déçus du peu d’empressement du gouvernement socialiste à satisfaire leurs attentes, les Kanaks, en novembre 1984, lancent alors un mouvement contestataire. La violence monte. À la fin du mois, on compte les trois premiers morts au cours d’une fusillade. Un jeune Caldoche de 17 ans,  Yves Tual, sera tué par les indépendantistes en janvier. Les affrontements et les décès se multiplient. Les pays se retrouve en état d’insurrection.

Le référendum de 1987, le NON écrasant

Un référendum prend place le 13 septembre 1987. Il donne 98,3% des suffrages contre l’indépendance avec une participation de 59,1% des inscrits. Parmi les Kanaks, les indépendantistes n’ont pas voté.

Nouvelle-Calédonie. Accords de Matignon.

Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, les deux leaders de la Nouvelle-Calédonie. Juin 1988.

 

En avril 1988, la violence est à nouveau à son apogée avec la prise de gendarmes en otages à Ouvéa. Il faut l’intervention de l’armée. Puis ce sera les accords de Matignon, au mois de juin, qui reportent l’échéance de dix ans, la mort aussi, un an plus tard, du leader indépendantiste, Jean-Marie Tjibaou, assassiné par un de ses militants en opposition avec ces accords.

Le prochain référendum prévu pour 2018

Mais en 1998, conscients qu’une nouvelle consultation mettrait le feu aux poudres, les décideurs repoussent le référendum entre 2014 et 2018. L’année prochaine !  Une manière aussi de se débarrasser du problème sur la génération à venir.

Le fond du problème, qui aura  le droit de vote ?

Toute la problématique se résume finalement à un point : qui aura le droit de voter au référendum ? Que tous les résidents de nationalité française soient convoqués aux urnes et les indépendantistes perdront. La Nouvelle-Calédonie restant française, les violences reprendront. Mais que l’on restreigne le vote aux seuls Kanaks, comme ils l’exigent, et c’est un viol de notre droit. Un déni de justice pour la majorité des Français d’origines diverses dont les ancêtres sont installés en Nouvelle-Calédonie, pour certains d’entre eux depuis plus d’un siècle.

Macron et ses gentils marcheurs au pouvoir ont une équation compliquée à résoudre : comment préserver les intérêts de la France, tout en satisfaisant les Kanaks, mais en assurant l’avenir, les droits, la sécurité des biens et des personnes qui ont fait la richesse de l’île. En d’autres termes, comment éviter un nouveau bain de sang, comme en Algérie, et une nouvelle injustice, identique à celle infligée aux Pieds-noirs en 1962 ?                         

Les Kurdes d’Irak veulent le pouvoir sur les chrétiens, le cas d’ Alqosh

Un maire chrétien viré par Barzani

Le 16 juillet dernier, le maire d’Alqosh, Faez Abed Jawahreh, un chrétien élu en 2014, a été limogé par Massoud Barzani. Ce dernier l’a remplacé par un Kurde qui lui est tout dévoué : Adel Amin Omar.

Massoud Barzani exerce les fonctions de président de la région autonome du Kurdistan irakien. Aux yeux des Kurdes, en grande majorité des musulmans sunnites, il apparaît comme le héros de l’indépendance annoncée.

Alqosh, trahie par Barzani est livrée à Daech

Alqosh ou Kar Aqosh, ville chrétienne du Kurdistan irakien

Tombes assyriennes. Alqosh


Alqosh
, en revanche, est une ville chrétienne, à l’image de nombreuses agglomérations du nord de la plaine de Ninive. Or, en août 2014, quand les hommes de Daech s’emparaient de la région, Barzani a donné l’ordre à ses troupes de se replier, abandonnant ainsi le territoire et ses habitants aux jihadistes.

Aprés l’éviction de Daech…

Certes, depuis, les Kurdes ont participé à la reprise d’Alqosh et de quelques villes chrétiennes en chassant les combattants de Daech avec l’armée irakienne soutenue par les Occidentaux. Mais les habitants se sentent trahis après bientôt trois ans de tyrannie et de crimes des islamistes radicaux.

Barzani veut le contrôle total

Très irrités par l’éviction de leur maire, que Barzani accusait de corruption sans donner de preuves, le 20 juillet les citoyens d’Alqosh sont descendus dans la rue. Ils portaient des drapeaux irakiens et des pancartes en trois langues : l’arabe, l’anglais et l’araméen qui reste leur langue. Ils n’arboraient ni drapeaux ni slogans en kurde.

Barzani s’est affolé d’une démonstration qui remet en question sa volonté d’annexer les populations chrétiennes du nord de l’Irak dans son projet indépendantiste kurde. Il a alors nommé, en remplacement d’Adel Amin Omar, « son » maire, une jeune femme du nom de Lara Yousif. C’est une chaldéenne, une chrétienne donc, qui appartient au PDK (Parti démocratique du Kurdistan) dirigé par la famille Barzani.

Or, le 25 septembre dernier, un référendum avait lieu au cours duquel les résidents de la région s’exprimaient sur le statut du futur Kurdistan. Victimes des trahisons et des poussées d’autoritarisme de Barzani, les chrétiens ne risquaient pas de voter oui à l’indépendance du Kurdistan.

Les chrétiens d’Irak n’ont pas non plus oublié le passé. À l’occasion de la Première Guerre mondiale, quand les Turcs massacraient les Arméniens, les Kurdes prêtaient la main aux assassins. En Irak, les mêmes Kurdes en ont profité pour éliminer nombre de chrétiens appelés chaldéens et assyriens * vivant dans le.s mêmes montagne qu’eux.

* Les chrétiens d’Irak appartiennent à de nombreuses branches. Néanmoins, les deux confessions principales sont les chaldéens et les assyriens. Elles sont toutes deux issues du nestorianisme, branche du christianisme née au Ve siècle de l’hérésie de Nestorius. Les assyriens sont restés fidèles à leur idéologie et y ont ajouté des sentiments nationalistes en  s’estimant les héritiers de l’ancien empire assyrien (2ème  millénaire av. JC). Les chaldéens ont rejoint l’Eglise de Rome tout en gardant leur propre rite liturgique.